Comme prévu, mon opposant ne semble pas enchanté par le sort que je lui réserve. Qui le serait, d’ailleurs ? Au contraire, il ne semble pas très bien comprendre la situation. Quand je lui parle, ses sourcils se froncent et on peut même sentir qu’il est prêt à paniquer. Des paroles confuses sortent de sa bouche. Il hésite, cherche ses mots, bafouille même, semblerait-il. Ses mots, je les écoute à peine. Quelques bribes de paroles me parviennent pourtant, mais je n’y prête tout simplement pas attention. ‘Discuter’. Ce mot, je l’ignore tout particulièrement. Car dans ce genre de situation, il n’y a tout simplement pas de place pour une discussion. Maintenant, mon seul et unique but, c’est de voir le sang de celui qui se trouve en face de moi couler sur le béton de la route.

J’avance d’un pas, il recule. Et il continue de parler. Mais je n’y prête pas attention et j’avance, encore. Ses muscles se tendent. Je sens qu’il se met peu à peu en position de défense, qu’il a une idée de ce qui l’attend. C’est assez jouisif, de le voir ainsi. Je sens alors toute l’hésitation qui règne en lui, et qui me donne encore plus envie de lui faire mal. En ce moment, je me sens en position de force face à lui. C’est normal, d’un côté. C’est moi qui l’agresse. En moi se réveille un monstre assoiffé de violence. Il faut que je me contrôle, que je m’approche encore plus de ma proie. Je dois me retenir, arriver à sa hauteur pour frapper, et faire mal.

Le coup part tel un automate. Je dois être à la bonne distance, puisque c’est presque par instinct que j’ai frappé. Mon bras se détend, le poing serré, pour se diriger vers la mâchoire du jeune homme. Un coup simple, facile à éviter, qui me permettra d’évaluer à qui j’ai affaire. Simple, certes, mais puissant également. Si mon poing atteint sa cible, c’est pour faire des dégâts. Aussitôt le coup partit, je tente de prévoir la réaction de mon opposant. Ce n’est pas facile, certes, mais c’est important. S’il évite en se baissant, je pourrais le frapper au menton avec mon genou. S’il évite sur le côté, je devrais reculer pour éviter une quelconque réplique de sa part. Enfin, s’il n’évite pas, je pourrais enchainer par un coup dans l’estomac. Mais l’action se passe si vite que j’ai à peine le temps de penser. Tout cela n’est qu’une théorie, dans le feu de l’action, on ne fait pas toujours ce que l’on désire.

Le combat s’engage, et mon adversaire ne peut que tenter d’éviter mes coups, que je lui assène de manière à faire le plus mal possible. Pendant quelques instants, l’affrontement n’est pas très palpitant. Je porte un coup, il tente de le parer, de l’éviter, ou bien il se le prend en plein fouet. Et ce manège se répète, encore et encore. Déjà, il crache du sang, et ne semble plus très bien en point. Peut-être parviendrai-je à le trainer dans l’asile sans trop de problèmes, finalement. Mais, alors que je lui assène un puissant coup de pied au visage et enchaine avec un deuxième en direction du ventre, je sens qu’il envoie son bras, non pas vers moi, mais vers un objet posé au sol. La scène se déroule en moins d’une seconde, et lorsque je me rends compte que ce sont des câbles métalliques qu’il a saisi  et qu’il envoi vers moi, je ne peux que me reculer d’un bond pour ne pas me faire toucher. Il ne semble pas viser d’endroit en particulier, de plus il est occupé à se relever, aussi je reste hors de portée de son arme, et lui tourne autour, tel un loup qui attend le meilleur moment pour attaquer.

- Je sais pas ce que c’est ton problème mais je sens que tu vas vite me faire chier… et je sais même pas qui t’es.

Parler en plein combat n’est pas la meilleur des stratégies. D’ailleurs, ses paroles n’atteignent pas mes oreilles. Tout ce que je vois, c’est qu’il n’attaque pas, alors qu’il vient de trouver une arme qui pourrait lui être utile. Il se contente de faire virevolter les câbles dans l’air, essayant sans doute de m’intimider. Mais je ne compte pas m’arrêter. Aussi, je m’approche de lui d’un pas assuré. Je ne m’élance pas, ne cours pas. Je marche droit vers ma cible. Il s’attend à ce que je recule ? Il se trompe. Je n’ai rien à perdre, tout à gagner. Du coin de l’œil, je surveille son pseudo-fouet. J’observe également son bras, tentant de prévoir son prochain coup, et l’éviter. Mon but est d’attraper les câbles, et de les tirer soit pour les arracher des doigts du jeune homme, soit le faire tomber. Et si je me fais toucher pendant l’opération, tant pis. Je ne peux tout simplement pas reculer. Non, je ne peux pas.